Eveline Safir Lavalette, moudjahida, combattante de la cause et de la Révolution algérienne, est décédée vendredi, à l’âge de 87 ans, en son domicile, à Médéa. Elle a été enterrée hier, au cimetière chrétien d’El Madania, à Alger.
La défunte avait, de son vivant, souhaité être enterrée à côté d’Henri Maillot et de Chaulet. «Nous avons exaucé son vœu», témoignent ses proches amis. Né en 1927, cette femme exemplaire, est issue d’une famille de pieds-noirs, vivant en Algérie depuis trois générations. La défunte, amie du professeur Pierre Chaulet, a grandi à Rouiba. En 1951 elle adhère à l’Association de la jeunesse algérienne pour l’action sociale (Ajaas), à travers laquelle elle mène des actions de solidarité en faveur des populations rurales. Elle côtoie juifs, musulmans, catholiques et laïcs dans ce mouvement disparate où l’objectif ultime est l’aide aux jeunes qui vivent dans des conditions précaires. Eveline épouse la cause nationale de libération en 1955. Elle se bat auprès des grands qui ont fait l’histoire de l’Algérie.
Elle témoigne d’ailleurs de son amour pour cette Algérie en 2013, lorsqu’elle présente à la librairie Chihab son ouvrage intitulé Juste Algérienne, comme une tissure, une biographie retraçant son parcours militant au sein du FLN et des institutions officielles du pays. Ce 2 juillet 2013, elle explique à la foule, venue nombreuse assister à sa conférence, qu’elle n’a pas publié cet ouvrage pour décliner son identité ou justifier sa nationalité et encore moins prouver son «algérianité», bien au contraire, le but était juste de dire qu’elle est issue du tissu familial, ombilical, voire biologique de son humus natal, l’Algérie.
Une Algérie qu’elle porte dans son cœur et pour que nul ne l’oublie. Eveline était non seulement une combattante, mais une battante. En s’engageant pour l’indépendance de l’Algérie en 1955, elle côtoie Benkhedda, Ben M’hidi et d’autres. Ses activités au sein du FLN sont nombreuses : elle était chargée de l’impression des tracts, du transport de matériel, de l’acheminement des colis spéciaux et de l’hébergement de certains grands chefs de la Révolution, parmi lesquels le colonel Ouamrane, Slimane Dehilis, Krim Belkacem, Larbi Ben M'hidi, Mohamed Seddik Benyahia, Abane Ramdane et Benyoucef Benkhedda. Elle participa, en 1956, à l’impression du premier numéro du journal El Moudjahid et assura également la transcription du communiqué final du Congrès de la Soummam, de «L’Appel à la grève des étudiants», ainsi que de la «Lettre du chahid Zabana à ses parents» avant d’être guillotiné, en juin de la même année.
Arrêtée le 23 novembre 1965 par la police française, torturée, elle est libérée en 1959. A l’indépendance, en 1962, Eveline est élue à l’Assemblée constituante, puis à la première Assemblée nationale en 1964. En 1967, elle épouse le doyen des journalistes, Abdelkader Safir. Elle participe à l’étude et à la mise en place du système éducatif avant d’intégrer le ministère du Travail en qualité de conseillère et occupe par la suite le poste de directrice de l’action sociale à Médéa jusqu’à la fin des années 1970. Retraitée, elle s’installe à Benchicao, à l’est de Médéa, avec son défunt époux, puis déménage, pour des raisons sécuritaires à Médéa en 1993, où elle passa le restant
de sa vie.